Interview avec / ANOH MISSA LIN à propos du BARM: "C' est l’alternative la plus intéressante pour démarrer une nouvelle vie"
Plusieurs dizaines de superviseurs de l’ANADER (Agence Nationale d’Appui au Développement Rural) issus de différentes localités du pays sont réunis pour deux semaines (du 31 Octobre au 11 Novembre 2022) au centre de formation de l’ANADER de Bingerville. Objectif : finaliser 437 Business Plan à soumettre au BARM pour le financement des Activités Génératrices de Revenus (AGR) de la première cohorte de bénéficiaires.
Bonjour, auriez-vous l’amabilité de vous présenter à nos internautes ?
Je suis ANOH MISSA LIN, coordonnateur de l’Unité de Coordination du Projet BARM au sein de l’ANADER. Je suis au siège de l’ANADER et nous avons pour attribution de suivre l’ensemble des activités que l’ANADER doit réaliser dans le cadre du projet BARM.
En quoi consiste l’atelier qui se tient au Centre de Formation de l'ANADER à Bingerville ?
Dans le cadre de la mise en œuvre du projet, l’équipe de l’ANADER a constitué dans les différentes localités, des entités d’écoute et de rédaction de projet. Ces équipes-là avaient pour mission de recevoir les bénéficiaires, de les profiler et de les former à la rédaction de leur plan d’affaires. La formation a déjà eu lieu et au cours de la formation, il y a un certain nombre de documents, de données que l’ANADER a souhaité avoir pour faciliter la rédaction des plans d‘affaires. Certains promoteurs les ont fournis et sur la base des informations fournies, l’ANADER s’est mise à rédiger les études.
Nous avons donc effectué une mission de terrain pour nous assurer de l’état d’avancement et sur la base des résultats de cette mission, nous avons souhaité que l’ensemble des équipes se regroupe à Abidjan pour plancher sur les deux-cents (200) projets qui ont déjà été rédigés en vue de les valider et puis passer à l’étape de réaction des deux-cents-trente-sept (237) projets qui restent. Ce regroupement se tiendra sur une période de deux semaines (c’est-à-dire du 31 octobre au 11 novembre 2022).
Ces équipes travaillent sous la supervision de coaches identifiés au sein de l’équipe ANADER qui ont une compétence avérée dans la rédaction des études de faisabilité, qui lisent les études et apportent des corrections qui sont prises en compte par les membres des équipes d’écoute qui sont sur place. Donc en gros, ces deux semaines seront essentiellement consacrées à la finalisation et à la rédaction des quatre cent trente-sept (437) études initialement prévues.
En quoi est-ce que cela constitue une étape importante dans le processus d’accompagnement de nos bénéficiaires ?
C’est le document qui va permettre de valider le projet par le FIDRA (Fonds International pour le Développent de la Retraite Active, partenaire financier du BARM, ndlr). Tant que le promoteur n’aura pas son étude de faisabilité rédigée, le FIDRA ne va pas l’analyser, ne va pas valider son idée de projet, ne mettra pas à sa disposition des ressources pour lancer le projet.
Alors quand ces études seront achevées, une commission de validation va siéger avec le FIDRA, le partenaire technique et le BARM. Une présentation de l’étude va se faire et sur la base de cette présentation, le FIDRA et la commission vont donner leur avis. Si l’avis est favorable, alors le projet est transmis au FIDRA afin que son comité de crédit puisse accorder le financement ou rejeter le projet. Une fois le financement accordé, c’est à partir de ce moment-là que la mise en œuvre physique du projet va démarrer. C’est vraiment le cœur de l’activité et ce document qui est en train d’être élaboré devrait servir de boussole à la mise en œuvre du projet. Voilà un peu l’intérêt de cette activité qui est en train d’être réalisée.
Donc sans cela, pas d’octroi de prêt au bénéficiaire ?
Sans cela, pas d’octroi de prêt ! Quel que soit le niveau d’implication ou le niveau de bonne volonté du bénéficiaire ou du promoteur, il ne pourra pas avoir de prêt.
En général, quelles sont les difficultés que vos collaborateurs rencontrent sur le terrain ?
La plus grosse difficulté qui a été relevée porte sur le manque de documents attestant la disponibilité de sites. Nous sommes dans une activité agricole qui se fait essentiellement sur un site. Alors si le promoteur ne peut pas justifier que le site lui a été cédé ou qu’il en est le propriétaire, il ne sera pas possible de mener l’activité, même si l’idée de projet est montrée rentable ou recevable. Tant qu’il n’aura pas résolu la question du site, l’activité ne pourra pas se mener.
La difficulté que nous rencontrons c’est d’arriver à disposer de documents qui justifient l’octroi, la cession ou encore la location du site, car il y a certains sites qui sont en location. Ça c’est la première difficulté. La deuxième difficulté porte sur le niveau d’intervention des promoteurs (bénéficiaire du projet BARM). Certains promoteurs pensent encore que la reconversion, c’est une action qui dépend des structures qui l’accompagnent, ils n’ont pas encore compris que c’est eux qui devaient être devant et puis amener l’ANADER à les accompagner sur le projet. Ce qui fait que dans la collecte de données, beaucoup sont encore en phase d’hésitation et tergiversation sur les données fournies. Quand ils envoient des données et qu’on évalue la qualité et qu’on estime que certaines recommandations leur sont données, ils pensent qu’on est en train de les emmerder ou encore de rendre leur projet difficile. Or en réalité, c’est pour qu’ils comprennent assez bien l’intérêt de l’idée de projet qu’ils ont formulée eux-mêmes et de savoir qu’il y a un certain nombre d’informations qu’ils doivent posséder pour mener à bien leur projet.
L’ANADER est l’un des partenaires par excellence du BARM avec un gros effectif de bénéficiaires à reconvertir dans l’agropastoral, comment êtes-vous organisés pour relever le défi ?
L’ANADER c’est quand même une grosse machine, c’est plus de 2500 agents. Nous avons un effectif assez important avec plusieurs spécialisations en notre sein. Aujourd’hui, la sollicitation du BARM porte sur 606 promoteurs (pour la première cohorte, ndlr). Dans notre approche, la réalisation d’études pour un effectif aussi important passe par une organisation beaucoup plus adaptée à l’objectif que nous avons en face. Pour les 606, nous avons prévu quatorze (14) équipes et ces équipes sont composées d’une cinquantaine d’agents. En dehors de ces agents, nous avons un niveau de contrôle qui est constitué par les différents chefs de centre et notamment dans les 51 zones d’installation des 606 bénéficiaires, nous avons 51 responsables de coach qui constituent un premier niveau d’analyse et de vérification des données qui sont fournies. Et aussi au niveau régional, un niveau d’analyse et au niveau du siège. Nous avons adapté notre dispositif à la mise en œuvre du projet. Ainsi, pour chaque étape de réalisation, le dispositif est recentré sur l’objectif à atteindre. Ce qui fait que pour nous, un effectif aussi important n’est pas la contrainte la plus élevée. Nos agents sont outillés, nous avons un peu plus de 11 mille promoteurs ou producteurs à encadrer par l’ANADER. L’effectif des 606 bénéficiaires du BARM qui nous a été affecté ne constitue pas un challenge insupportable., c’est quelque chose qu’on peut facilement réussir.
Avez-vous le sentiment que nos bénéficiaires sont réellement intéressés par le projet, par les formations entrepreneuriales, est-ce qu’ils y croient ?
Oui pour certains ! Vous comprenez que ce sont des personnes qui ne sont pas réellement habituées à faire des activités de ce type-là. On les a amenés pendant des années à exécuter des tâches. Aujourd’hui, eux-mêmes doivent se positionner comme des hommes d’affaires. Il y a un certain nombre de mécanismes qui ne sont pas encore acquis à leur niveau. Mais certains ont démontré leur intérêt en démarrant leur activité, avant même que le projet leur mette à disposition des ressources. Ils ont commencé par créer une activité génératrice de revenus qui devrait permettre de montrer toute leur bonne foi dans la réussite du projet à venir. On a un certain nombre de promoteurs qui présentent un bon profil entrepreneurial.
Nous sommes l’entité d’exécution qui a le plus de bénéficiaires dans l’agriculture et cela montre que l’agriculture demeure encore un secteur attrayant et qui permet de créer un certain nombre d’activités qui génère des ressources. Sinon, je ne suis pas sûr qu’ils seraient venus à l’agriculture. De façon générale, il faut reconnaître que 60% des emplois crées en Côte d’Ivoire sont dans le projet agropastoral.
Quelles seront les prochaines étapes ?
Nous finissons les études de faisabilité. Juste après nous avons les comités de validation, dont la composition est connue et présentée par le BARM. Quand ces études seront achevées, une commission de validation va siéger avec le FIDRA, le partenaire technique et le BARM. Une présentation de l’étude va se faire et sur la base de cette présentation, le FIDRA et la commission vont donner leur avis. Si l’avis est favorable, alors le projet est transmis au FIDRA afin que son comité de crédit puisse accorder le financement ou rejeter le projet. Une fois le financement accordé, c’est à partir de ce moment-là que la mise en œuvre physique du projet va démarrer. On aura au niveau de chaque zone ANADER du personnel, des points focaux qui vont travailler en étroite collaboration avec les points focaux du BARM pour commencer à installer avec les promoteurs, les différents projets,
Pour terminer, un appel à l’endroit des bénéficiaires qui hésitent encore ?
Je préfère être parmi les premiers en général, parce que c’est le moment où on est moins regardant sur les critères. Les promoteurs qui hésitent encore, il vaut mieux être parmi les premiers et si vous y êtes, vous aurez peut-être plus de chance que les prochains qu’on va installer, car les critères risquent d’être un peu plus corsés au regard des résultats que les premiers vont avoir. L’engouement que suscitera la mise place des nouveaux projets fera qu’à un moment donné, le BARM, afin de pouvoir juguler l’effectif ou le flot important de bénéficiaires, va créer un certain nombre de goulot d’étranglement. Tous ceux qui sont encore hésitants gagneraient à se rapprocher du BARM, vérifier les conditions d’inscription au BARM et commencer à mûrir leur idée de projet ; C’est l’alternative la plus intéressante pour démarrer une nouvelle vie en dehors de l’armée.
SERCOM BARM